Stencil letters, lettres au pochoir

Dates: 
Vendredi 31 Janvier 2003

Séminaire :  Department of typography and graphic communication

Le 31 janvier 2003, l’Institut d’histoire du livre organisait, avec le Department of Typography & Graphic Communication de l’Université de Reading , une journée consacrée au pochoir. Parmi les participants, on comptait plusieurs personnes de l’IHL dont Odile Blanc, Alan Marshall, Elisabeth Parinet et Dominique Varry.

Depuis plus de trente ans, le Department of Typography & Graphic Communication, unique en son genre au sein d’une université britannique, mène des recherches à la fois théoriques et pratiques dans les domaines extrêmement variés de l’histoire de l’imprimerie et des caractères, de l’édition électronique et du design éditorial. Ces domaines constituent les axes des programmes destinés aux étudiants, encadrés par les meilleurs spécialistes parmi lesquels Michael Twyman et James Mosley, désormais familiers de l’École de l’Institut d’histoire du livre où ils interviennent régulièrement.

Après quelques mots de bienvenue de la part de Sue Walker (directrice du Département) et Eric Kindel (responsable de l’organisation de la journée), c’est au tour de Michael Twyman et Martin Andrews de présenter les riches collections acquises par l’Université et le Département dans les domaines de la typographie et de la communication graphique. Les étudiants ont en premier lieu accès aux fonds importants de la bibliothèque de l’université, ainsi qu’à des fonds spéciaux qui constituent un matériel exemplaire au regard des sujets traités : la Cole Library et l’Overstone Library ; une collection de livres pour enfants particulièrement remarquable ; un ensemble relatif à l’Exposition universelle de 1851. Citons encore un ensemble rassemblant d’une part des ouvrages intéressant l’histoire de l’impression, d’autre part une collection de caractères acquise de Hans Schmoller et provenant pour la plupart de l’Allemagne du XXe siècle, et enfin des facsimilés de quelques uns des premiers livres imprimés, telle la Chronique de Nuremberg ou le Songe de Poliphile. Le Department of Archives and Manuscripts de l’université conserve également d’importants fonds relatifs à l’édition et à l’imprimerie britanniques, provenant de George Allen & Unwin, George Bell & Sons, The Bodley Head, Jonathan Cape, Chatto & Windus, Heinemann Education Books, The Hogarth Press, Longman Group, Macmillan & Co, The Publishers Association, Routledge & Kegan Paul, Secker & Warburg. Le Département possède encore du matériel d’impression du XIXe siècle (des presses Columbian, Atlas et Stanhope), ainsi qu’une importante collection de caractères en bois et en plomb. Bois gravés, planches de bois ou de cuivre, plaques gravées en creux sont à la disposition des étudiants. Enfin, le Département possède une presse lithographique du XIXe siècle ainsi qu’une collection de pierres, et une Monotype en activité.

Livre de coeur

Tout au long de cette journée, les participants pouvaient étudier les collections relatives à l’impression au pochoir spécialement mises à leur disposition.

L’usage du pochoir pour les lettres et l’impression des textes est attesté dès le XVIIe siècle. Eric Kindel, spécialiste de ce domaine, présenta tout d’abord l’histoire de cette pratique, fortement liée aux textes liturgiques et en particulier aux livres de chœur, dont le très grand format n’était guère compatible avec les caractères mobiles en usage depuis Gutenberg. Le texte s’inscrivait donc sur le papier lettre après lettre, au moyen d’une « impression » manuelle et directe : la couleur, appliquée à la brosse, passait ainsi à travers l’outil qui en assurait le transfert.

Stencil

Eric Kindel présenta ensuite un projet en cours, qui vise à reconstituer le matériel utilisé vers 1700 pour imprimer des textes au pochoir, à partir notamment d’un texte de la fin du XVIIe siècle écrit par le Français Gilles Filleau des Billettes pour l’Académie royale des sciences. Ce projet a rallié divers experts parmi lesquels James Mosley et Fred Smeijers, chercheur et dessinateur de caractères néerlandais. Ce dernier s’attacha particulièrement à la fabrication des pochoirs, généralement réalisés dans un alliage de laiton et de zinc.

Une partie de l’après-midi fut consacrée à des démonstrations qui furent aussi l’occasion de vives discussions, avant que James Mosley ne prenne la parole pour nous présenter l’usage « vernaculaire » du pochoir en France, du menu affiché à la porte de modestes cafés aux panneaux de signalisation, des enseignes de boutiques de nouveautés plus vraiment nouvelles aux noms des rues comme des bateaux. Ce voyage insolite au cœur des provinces françaises démontrait l’usage quotidien – au point de paraître inaperçu – du pochoir pour former des lettres.

La journée se termina par une dernière intervention d’Eric Kindel à propos de l’impression de textes au pochoir aux Etats-Unis, entre 1850 et 1900.

Le grand intérêt de cette journée, qui alliait exposés et démonstrations dans un cadre véritablement enchanteur, décida les organisateurs à poursuivre l’expérience. Rendez-vous donc de l’autre côté de la Manche, à Lyon, pour une nouvelle édition de cette collaboration fructueuse entre le Department of Typography & Graphic Communication de l’Université de Reading et l’Institut d’histoire du livre.

Pour en savoir plus, les articles d'Eric Kindel :
"Marked by time", Eye 10(40), été 2001, 48-51
"Stencil work in America 1850-1900", baseline 38, été 2002, 5-12
"Recollecting stencil letters", Typography papers 5, 2003