Typographie et calligraphie Deuxième partie : 1830-2000

Ce cours traite la période qui débute avec l’industrialisation de l’imprimerie et des métiers qui lui sont liés et les effets visuels qui en découlaient dans les domaines de la typographie, de la publicité et du graphisme de l’information. De nouvelles techniques d’imprimerie, comme la lithographie, ont ouvert la voie à l’usage de grandes lettres dessinées à la main ainsi qu'à la couleur. Ces évolutions ont eu un impact profond sur les formes des caractères destinés à un usage promotionnel.

Cela dit, la fonderie typographie s’est montrée assez résistante, à bien des égards, aux changements techniques qui touchaient alors de nombreux secteurs de l’imprimerie. Si la fonte des caractères fini par être mécanisée, on continua à graver les poinçons à la main jusqu’à la fin du XIXe siècle et de nombreux livres étaient composés à la main jusqu’aux premières décennies du XXe siècle. Dès 1900, il était cependant possible de réaliser un nouvel alphabet typographique plus ou moins directement à partir des dessins originaux du concepteur du caractère en utilisant la nouvelle machine à graver des poinçons (ou des matrices) de Benton. Ce dispositif – qui employait le principe du pantographe – rendait possible la mise au point de systèmes de composition intégrés comme la Linotype ou la Monotype, ainsi que la production de caractères sous des appellations commerciales spécifiques, un développement essentiel pour la survie de la fonderie typographique traditionnelles. Par conséquent, l’histoire des caractères typographiques au XXe siècle est souvent liée aux noms de dessinateurs de caractères les plus en vue, comme Goudy, Gill, Van Krimpen et Koch, ou encore Zapf et Frutiger pour la deuxième moitié du siècle. Les formes des caractères typographiques reflètent aussi certains des mouvements qui ont jalonné l’histoire du design : le mouvement Arts and crafts, l’art nouveau, le modernisme.

Le cours commence avec l’expansion des formes plus agressives de la typographie commerciale qui ont servi la promotion de produits industriels et qui fournissaient de nouveaux modèles de caractères, toujours en usage comme les antiques ou les égyptiennes. Il offre également un panorama des formes typographiques héritières du passé. Le goût de l’ancien, qui s’est affirmé relativement tôt, a persisté jusqu’à l’ère de la typographie numérique, à travers de nombreuses « reprises » de modèles historiques du XVe au XVIIIe siècle. Le cours passera en revue quelques designers de caractères des plus connus, mais rendra aussi justice à des figures comme Morris Fuller Benton de la compagnie américaines des fondeurs de caractères, C. H. Griffith de la société Linotype Mergenthaler, et Frank Hinman Pierpont, avec son collègue allemand Fritz Max Steltzer à la tête du bureau du dessin des caractère de la société Monotype anglaise. Il s’agit, en effet, de rendre hommage aux « directeurs artistiques » qui ont largement contribué à la qualité de la plupart des caractères les plus pérennes du XXe siècle.

Avec du recul, cette période paraît comme l’âge d’or de l’imprimerie typographique ; une période durant laquelle les nouveaux caractères conçus pour la composition mécanique pouvaient être employés à côté des caractères de fonderie qui étaient encore réalisés avec des matrices des siècles précédents ; le tout étant souvent imprimé avec grand soin sur des presses mécaniques d’une précision inégalée jusqu’alors. La Deuxième Guerre mondiale marque la fin de cette époque, non seulement parce que la production de nouveaux caractères fut momentanément interrompue, mais aussi parce qu’en 1945 la disparition du caractère en plomb et son remplacement par la photocomposition (un développement annoncé depuis longue date par la presse professionnelle) semblait enfin prêt à prendre sa place dans les ateliers. Il y a eu, néanmoins, d’importantes réalisations dans le domaine de la fonderie typographique traditionnelle durant la seconde moitié du XXe siècle. Pour ne prendre que deux exemples remarquables : la brillante série de caractères commercialisés par la petite fonderie marseillaise Olive, résultant du génie inventif de Roger Excoffon ; le travail d’Hermann Zapf dont le premier alphabet, un élégant fraktur, apparut en 1939 et dont le Palatino et l’Optima, réalisés par la fonderie Stempel à Francfort, restent parmi les caractères les plus pérennes crées pour l’imprimerie typographique.
Le cours s’achève sur l’étude du travail de quelques dessinateurs de caractères qui ont travaillé principalement ou exclusivement dans le domaine de la typographie numérique.